Le pavillon d’or, Yukio Mishima: l’oeuvre au rouge.

Roman trop souvent perçu comme une ode à la beauté et à la folie, ou l’étude de leur interaction, le Pavillon d’Or incarne surtout la tension douloureuse d’une conscience prise entre l’être et le non-être, prisonnière de la vie comme de l’éternité.

La beauté, stérile et venue au monde par les touches de vide au sein d’un plein nauséeux, doit donc nécessairement mourir. Les “structures édifiées sur du non-être” de ce temple-univers ne peuvent que retourner à leur néant premier pour purifier l’air chargé de passé, et celui qui en serait l’instigateur libérerait cette insoutenable harmonie de son carcan limité, de cette cruauté intrinsèque de l’être. Il était à la fois le berceau et le tombeau du soi, et cette ambivalence enchaînait la conscience isolée dans des liens insistants qu’il lui fallait détruire.

La fascination du mal ne provient pas ici d’un désir de transgression sociale, mais constitue l’envers et l’antidote d’une présence venimeuse: celle de la splendeur et de sa fidèle compagne la musique. Car ce n’est qu’en faisant mourir l’éphémère féroce que l’anonyme se hisse au rang de l’éternité, et seul le feu qui consume l’axe du monde sauve le jeune homme de son ennemi mortel: le devenir.

L’incendie du pavillon d’or sous une lune complice était un suicide, un meurtre de soi nostalgique qui signifiait l’unique et véritable naissance de la liberté.

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